Le banquier d’affaires Ruben Vardanian, l’une des personnalités les plus réputées du secteur financier russe, a été nommé, vendredi 4 novembre, au poste de chef du gouvernement du Haut-Karabakh, une région du Caucase peuplée d’Arméniens qui s’est autoproclamée indépendante dans les années 1990 et reste disputée militairement entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.
Qu’est-ce qui a bien pu pousser l’oligarque russo-arménien en vue de 54 ans, né à Erevan, en Arménie, à quitter sa confortable vie moscovite pour Stepanakert, l’austère capitale du Haut-Karabakh ? Le 1er septembre déjà, il avait annoncé sur les réseaux sociaux son installation dans la région au prix d’une initiative radicale. « J’ai pris la décision, réalisant les risques que je prenais, de renoncer à la nationalité russe et de déménager au Haut-Karabakh en tant que citoyen arménien. »
Selon lui, depuis la défaite militaire subie par l’Arménie à l’automne 2020, la population de l’enclave « se sent abandonnée ». Son but est de la soutenir. « Les Arméniens du monde entier doivent être aux côtés du peuple d’Artsakh [Haut-Karabakh, en arménien] », a déclaré l’entrepreneur, qui y mène depuis des années des actions de mécénat social et culturel.
Peu après son installation, le président de la région autoproclamée, Arayik Haroutiounian, lui a demandé de conduire les affaires courantes. A Ruben Vardanian, désormais, de gérer la perte des ressources dues à la guerre, les infrastructures ravagées, l’absence de chauffage et d’électricité, les déplacés, la menace de nouveaux affrontements.
Entregent légendaire
La tâche s’annonce ingrate, voire dangereuse, dans un contexte de guerre jamais éteinte, même s’il met toute sa fortune, estimée par Forbes à 1 milliard de dollars en 2021 (même montant en euros), au service de la cause. Enclavée, pauvre, épuisée par la guerre, la région, un confetti peuplé d’Arméniens très attachés à leurs terres ancestrales, se délite.
Les affrontements de 2020, qui ont fait plus de 6 500 morts dans les deux camps, se sont achevés par une déroute militaire arménienne, la perte de territoires au profit de l’Azerbaïdjan, dont la population avait été chassée entre 1992 et 1994, et un fragile accord de paix parrainé par Moscou. Régulièrement, des escarmouches éclatent, soit au Haut-Karabakh, soit sur la frontière reconnue entre les deux pays, comme ce fut le cas en septembre (286 morts).
Ruben Vardanian se dit prêt à relever le défi. « Un banquier d’affaires est fondamentalement un négociateur. Mon expérience en entreprise montre que je peux négocier avec des personnes très différentes. (…) Je veux être efficace », a-t-il confié dans un entretien au quotidien russe Kommersant dans son édition du 3 novembre. « Suis-je prêt à assumer la responsabilité de ce qui se passe dans le monde arménien ? Je fais ça depuis vingt ans. Suis-je prêt à faire des choses qui me mettent mal à l’aise ? Oui », ajoutait-il.
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